Projet de loi C-11 sur la radiodiffusion : foire aux questions

Illustration © Sébastien Thibault

En réponse au niveau élevé de désinformation lié au projet de loi C-11 dans les médias et sur les réseaux sociaux, la CDEC a décidé de répondre aux questions les plus souvent posées sur la Loi sur la diffusion continue en ligne (projet de loi C-11).

 

faq c11

Les créateurs canadiens seront-ils avantagés par C-11 ?

Oui! C-11 vise à faire en sorte que toutes les entreprises engagées dans la diffusion en ligne de contenus culturels aient des obligations comparables à celles des diffuseurs traditionnels. L’un des objectifs du projet de loi est de faire en sorte que les fonds disponibles pour la création et la production de contenus soient plus importants.

C-11 pourrait aussi offrir plus de visibilité pour de nombreux créateurs qui ne sont pas poussés actuellement par les plateformes. Cela s’inscrit par ailleurs dans la même logique que les exigences de présentation des contenus canadiens et francophones à la radio.

Actuellement, les plateformes choisissent les critères qui déterminent quels contenus sont mis en valeur. Certains créateurs ont d’ailleurs critiqué l’opacité et l’orientation des algorithmes. Les utilisateurs, dont les enfants, peuvent actuellement passer des heures sur un service sans qu’on ne leur propose des contenus locaux.

La nouvelle réglementation pourrait permettre au CRTC, après consultation, de déterminer qu’une part des recommandations proposées aux utilisateurs doit aussi tenir compte de leur langue et du lieu où ils habitent, en plus de leurs préférences plus générales.

Pourquoi les réseaux sociaux doivent-ils être inclus dans la législation ?

Seules les activités de diffusion de contenus culturels des entreprises de médias sociaux seraient couvertes par le projet de loi.

Certains médias sociaux sont des lieux importants d’accès à la culture. YouTube est le plus grand diffuseur de musique en ligne au pays. Légiférer Spotify ou QUB Musique, mais pas YouTube, par exemple, serait incohérent et injuste.

De plus, les activités de radiodiffusion sur les médias sociaux évoluent rapidement. Par exemple, avec « Watch », Facebook a intégré une fonction qui permet de visionner un fil composé de vidéos mis en ligne par les utilisateurs. Les utilisateurs peuvent y visionner, par exemple, le premier épisode de Virage diffusé par Noovo.

Avec le lancement de sa nouvelle plateforme de distribution et de promotion musicale, SoundOn, Tik Tok veut faire en sorte que les artistes indépendants utilisent sa plateforme pour lancer leur musique et la distribuent éventuellement sur d’autres plateformes. De plus, TikTok a récemment conclu une entente avec CBC pour la diffusion de la série Street Cents, ce qui pourrait l’amener encore plus clairement sur le terrain de la loi sur la diffusion continue en ligne.

C-11 est-il une menace à la liberté d’expression des Canadiens ?

Non! La plupart des experts conviennent que C-11 respecte intégralement la liberté d’expression des internautes canadiens, car il y a plusieurs dispositions dans le projet de loi pour protéger ce droit fondamental – qui est également protégé par la Charte canadienne des droits et libertés. Par exemple, le ministre fédéral de la Justice, David Lametti, un expert en propriété intellectuelle, a examiné le projet de loi C-10 (le prédécesseur immédiat de C-11) et n’a trouvé aucun conflit avec la Charte. Aussi, quatorze avocats spécialisés bien connus dans les communications se sont prononcés en faveur de C-10 en réfutant tout atteint à la liberté d’expression des internautes par le projet de loi.

Que va-t-il se passer concrètement lorsque la loi sera en vigueur ?

Seules les entreprises pourraient avoir de nouvelles obligations. Les créateurs et les utilisateurs continueront d’utiliser les médias sociaux comme ils le font actuellement. Les seules règles qu’ils devront respecter sont celles qui seront dictées par une entreprise de média social, comme c’est le cas actuellement.

C-11 établira de nouvelles exigences pour les entreprises en ligne uniquement lorsqu’elles diffusent des contenus tombant sous la portée de la loi, comme des émissions de télévision, des films et des pièces musicales.

Après analyse des données, le CRTC déterminera quelles entreprises devront contribuer à la culture canadienne, et comment, par exemple en appuyant financièrement la création de contenus culturels, en mettant en valeur des émissions canadiennes, en fournissant des informations pertinentes au CRTC, etc.

Est-ce que les créateurs de contenu sur les médias sociaux vont devoir remettre 30% de leurs revenus à un fond pour soutenir la création de contenu canadien ?

Non. Le projet de loi ne changera rien pour les utilisateurs qui gagnent des revenus en partageant des contenus sur les médias sociaux. Seules les entreprises de médias sociaux pourraient avoir des obligations financières, afin de soutenir la création et la production culturelle au Canada.

Est-ce que je pourrai m’exprimer librement en ligne si le projet de loi C-11 est adopté ?

Oui, le projet de loi C-11 n’a aucune incidence sur la capacité des Canadiens à s’exprimer en ligne. Le projet de loi peut exiger que les entreprises de diffusion en ligne contribuent à l’écosystème canadien, mais aucun artiste ne sera limité dans sa capacité à publier en ligne en raison de ce projet de loi.

Qu’est-ce que la découvrabilité et pourquoi est-elle importante ?

La découvrabilité est un concept qui dépasse largement le cadre d’application du projet de loi C-11. La CDEC a produit un rapport sur la question récemment. Mais cela va bien au-delà de faire en sorte qu’un contenu soit simplement trouvable.

Dans le cadre d’une Loi sur la radiodiffusion s’appliquant aux services en ligne, il pourrait s’agir d’exigences pour la mise en valeur de contenu particuliers (canadiens, francophones, autochtones, etc.) via les outils de recommandation de ces services.

Sur des sites disposant de catalogues de milliers, voire de millions de contenus, les mécanismes de recommandation permettent de découvrir des contenus que l’utilisateur n’aurait pas trouvés autrement.

Réglementer les outils de recommandation des plateformes en ligne, c’est aller trop loin ?

Non. Les outils de recommandation des plateformes en ligne ne sont pas neutres, loin de là :  ils sont déjà biaisés de manière à répondre aux intérêts commerciaux des entreprises du web. Par exemple, sur YouTube, 64 % des recommandations vont aux contenus qui ont plus de 1 millions de vues, et seulement 5% de ces recommandations mettent en valeur des contenus visionnés moins de 50 000 fois. Sur Spotify, les catalogues des majors fournissent 85% des chansons, mais 90% des pièces incluses dans les listes de lecture.

La mise en valeur des contenus sur les plateformes n’est pas aléatoire, ni basée uniquement sur les préférences personnelles des consommateurs. En plus, elle ne tient pas compte des spécificités culturelles du marché dans lequel les plateformes opèrent. La réglementation vise à ce que des objectifs d’intérêt général, comme la politique canadienne de radiodiffusion, soient également pris en compte.

Si l’on valorise les créations locales, cela va-t-il nuire au rayonnement de ces créations à l’international ?

Non, car ce ne serait dans l’intérêt de personne, et surtout pas dans celui des plateformes en ligne.

Certaines personnes brandissent cette menace en arguant que les contenus canadiens seraient artificiellement recommandés plutôt que d’être proposés par popularité et, étant impopulaires, les gens ne les regarderaient pas, ce qui leur ferait perdre des points.

Le système de recommandation pourrait très bien proposer des contenus canadiens ET populaires, puisqu’il y en a en masse! Mais surtout, ce n’est pas parce qu’un contenu est peu populaire qu’il ne peut pas le devenir grâce à la recommandation. Les mécanismes de recommandations permettent justement à des créateurs émergents de gagner en popularité.  Si les créateurs de ces contenus sont davantage découverts et appréciés au Canada, cela augmentera leur pointage dans le système de recommandation et les propulsera d’autant plus à l’international.

Enfin, tout n’est pas qu’une question de pointage et d’algorithmes. Les listes de lecture, les bannières de publicité, les challenges, les hashtags, etc. sont aussi déterminés par des décisions éditoriales, donc humaines.

Des contenus seront-ils bloqués sous la nouvelle Loi sur la radiodiffusion ?

Non. Aucun contenu légal en ligne ne sera bloqué en raison de la nouvelle loi.

Le projet de loi C-11 contrevient-il à la neutralité du net ?

Non, le projet de loi C-11 ne contrevient pas à la neutralité du net.

La neutralité du net requiert que les fournisseurs d’accès à Internet (comme Bell ou Vidéotron) n’aient pas le droit de limiter l’accès à un contenu web ou de ralentir son accès au profit d’un autre. La mise en valeur de certains contenus à l’intérieur des applications ne contrevient donc pas à la neutralité du net.

 

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